Le prologue de Plumes (Feathers), du réalisateur égyptien Omar El Zohairy, fait l’effet un coup violent porté à l’estomac. Dans le paysage lugubre d’une cour d’usine poussiéreuse, un corps s’enflamme. Le spectateur est brusquement propulsé quelques années en arrière, en cette tragique journée du 17 décembre 2010 où, après qu’on lui a une fois de plus confisqué son outil de travail, une charrette, le jeune Tunisien Mohamed Bouazizi s’immole par le feu devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid.
La suite du film pourrait paraître sans lien avec cette introduction aussi brutale qu’inattendue. Plumes semble en effet prendre une direction sans rapport direct avec l’acte désespéré du jeune vendeur ambulant, qui marqua symboliquement le début des Printemps arabes de 2011.
Dans le huis clos d’un petit appartement aux murs sales, Omar El Zohairy filme la vie quotidienne d’un couple égyptien et de ses enfants. L’homme (Samy Bassouny) travaille dans l’usine toute proche et règne sur sa famille en patriarche autoritaire. L’argent, qu’il distribue au compte-gouttes, est rangé sous clef dans une boîte en fer.