A quand une première carte UFC en Afrique? Avec trois champions nés sur ce continent, Francis Ngannou chez les lourds, Israel Adesanya chez les moyens, Kamaru Usman chez les welters, qui squattent même trois des quatre premières places du classement pound-for-pound (toutes catégories confondues) de la plus grande organisation de MMA à travers la planète, la question se pose plus que jamais. Mais pour Ngannou, toujours en bisbille contractuelle avec l’UFC, faire venir cette dernière n’est pas la solution pour développer sa discipline en Afrique.
« On a souvent l’habitude de dire: ‘On veut que l’UFC vienne en Afrique’. Mais d’un autre côté, je me rends compte qu’on devient une fois de plus dépendants, explique le combattant camerounais dans une interview exclusive accordée à RMC Sport. En Afrique, on peut développer une organisation comme l’UFC et être enviés par l’UFC. On a tout le potentiel, tout ce qu’il faut. Je pense que l’Afrique peut développer un truc assez grand, assez beau et adapté pour le continent. L’UFC, c’est beau, mais qu’est-ce qu’on leur envie? On a les combattants qu’il faut. Il y a plus de 550 combattants hommes à l’UFC et moins de 50 combattants africains. Mais sur les sept catégories, il y a trois champions africains. Ça représente un moins de 5% de combattants africains mais 43% de champions. En termes de pourcentage, on domine largement l’UFC. »
Et « The Predator » de pousser l’analyse avec un rappel d’un problème qui touche souvent son continent, qu’on vient piller pour son propre intérêt: « On ne va pas toujours espérer que certains, pour leur bonne grâce, viennent faire un événement puis s’en aillent. Derrière, qu’est-ce qu’on gagne? Qu’est-ce que nos jeunes qui restent derrière gagnent? Si l’UFC vient en Afrique, l’événement va être beau et médiatisé mais une fois qu’ils sont partis, qu’est-ce qu’il reste? En quoi les jeunes qui sont là en profitent? Ils ramassent les sous et ils s’en vont… »
Arrivé en Europe au terme d’un voyage semé d’embûches pour pouvoir vivre son rêve de boxe avant de basculer vers le MMA, Ngannou aimerait voir les combattants locaux disposer de structures adéquates pour pouvoir imiter sa réussite. Jusqu’à penser qu’il ne porterait sans doute pas la ceinture des lourds si c’était le cas. « S’il y avait plus d’opportunités pour des Africains, je doute fort que je serais champion. Je suis persuadé qu’on a tellement de talents qu’il y a beaucoup plus fort que moi mais qu’ils n’ont juste pas cette opportunité. On peut nous-mêmes se donner cette opportunité et développer notre sport à une échelle encore plus grande que l’UFC. »
On en vient à se demander si l’intéressé pourrait mener cette idée à terme en développant sa propre promotion en Afrique. « Une organisation Ngannou? Non. Mais peut-être la Three Kings Promotion. » Avec ce nom, « les trois rois », le Camerounais implique Adesanya et son grand pote Usman et sous-entend l’idée de créer une organisation locale avec eux. Et quand on l’interroge pour savoir s’il leur en a déjà parlé, son grand sourire ne trompe pas. « Un petit peu », se contente-t-il de lâcher. Partis conquérir l’Amérique et le monde, Ngannou, Adesanya et Usman reviendront peut-être un jour en Afrique en bâtisseurs. Leur continent, aux potentiels populaire et sportif énormes, le mériterait bien.