Le Nigeria Elit Ses Gouverneurs, Puissants « Parrains » D’un Pays En Crise

Must Read

Ils sont les « parrains » du système fédéral nigérian. Les gouverneurs de 28 des 36 Etats qui composent le pays le plus peuplé d’Afrique doivent être désignés samedi 18 mars, au terme d’un scrutin qui s’annonce délicat pour la majorité. Un premier défi d’ampleur pour Bola Tinubu, le président élu du Nigeria, candidat victorieux du Congrès des progressistes (APC) et lui-même ancien gouverneur de Lagos.

A la tête de régions aussi vastes et peuplées que certains pays, ces barons locaux ont la main sur d’énormes ressources et ont une grande influence sur les nominations, tant au niveau local que national. La pratique du « parrainage » est au cœur de la machine politique nigériane et, avant de remporter la présidentielle, Bola Tinubu a été le plus célèbre godfather du pays.

Gouverneur de l’Etat de Lagos entre 1999 et 2007, il a œuvré à l’élection du président Muhammadu Buhari en 2015 et a toujours choisi lui-même ses successeurs. Jusqu’à présent du moins. Car c’est Peter Obi, le populaire candidat du Parti travailliste (LP), qui est arrivé en tête dans l’Etat de Lagos lors de la présidentielle.

Vous pouvez partager un article en cliquant sur les icônes de partage en haut à droite de celui-ci.
La reproduction totale ou partielle d’un article, sans l’autorisation écrite et préalable du Monde, est strictement interdite.
Pour plus d’informations, consultez nos conditions générales de vente.
Pour toute demande d’autorisation, contactez sy*********@le*****.fr.
En tant qu’abonné, vous pouvez offrir jusqu’à cinq articles par mois à l’un de vos proches grâce à la fonctionnalité « Offrir un article ».

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/03/18/le-nigeria-elit-ses-gouverneurs-puissants-parrains-d-un-pays-en-crise_6166043_3212.html

Depuis, l’attention est braquée sur le candidat du Parti travailliste au poste de gouverneur dans cette région, Gbadebo Rhodes-Vivour – alias « GRV » – un architecte de 40 ans, à l’allure dynamique, qui promet plus de transparence et des investissements dans les transports, la santé ou l’éducation. Face à lui, le gouverneur sortant, Babajide Sanwo-Olu met en avant son bilan et, bien sûr, sa proximité avec les chefs traditionnels et le président élu.

Une carte électorale « totalement redessinée »
L’enjeu est de taille dans un Etat fédéré qui compte plus de 20 millions d’habitants et qui se classe parmi les dix premières puissances économiques africaines en termes de PIB. Cette campagne serrée a attisé les tensions entre les Yoruba – l’éthnie de Bola Tinubu – et les Igbo – le groupe ethnique de Peter Obi. Le directeur de la campagne du LP a dénoncé mardi 14 mars les manœuvres de « politiciens désespérés ». « La vérité, c’est que plus de Yoruba que de Igbo ont voté pour notre candidat (…) car les gens veulent une meilleure gouvernance et libérer Lagos de l’emprise [de politiciens qui se comportent comme] un syndicat du crime organisé », peut-on lire dans le communiqué du LP.

L’opposition espère en tout cas confirmer ses scores de la présidentielle dans certaines régions-clés lors du scrutin de samedi. Atiku Abubakar, le candidat du Parti démocratique populaire (PDP), a enregistré une percée dans le nord-ouest du pays (Kaduna, Katsina), jusque-là acquis au Congrès des progressistes. Par ailleurs, l’Etat de Kano, le deuxième plus peuplé du pays, pourrait tomber aux mains du Nouveau Parti du peuple nigérian (NNPP), de Rabiu Kwankwaso, qui a obtenu une majorité écrasante dans cette région lors de la présidentielle. Il n’est pas exclu non plus que la capitale fédérale, Abuja, bascule, elle, dans le camp travailliste.

Vous pouvez partager un article en cliquant sur les icônes de partage en haut à droite de celui-ci.
La reproduction totale ou partielle d’un article, sans l’autorisation écrite et préalable du Monde, est strictement interdite.
Pour plus d’informations, consultez nos conditions générales de vente.
Pour toute demande d’autorisation, contactez sy*********@le*****.fr.
En tant qu’abonné, vous pouvez offrir jusqu’à cinq articles par mois à l’un de vos proches grâce à la fonctionnalité « Offrir un article ».

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/03/18/le-nigeria-elit-ses-gouverneurs-puissants-parrains-d-un-pays-en-crise_6166043_3212.html

« La carte électorale a été totalement redessinée » au lendemain de ces élections générales (présidentielle et législatives) extrêmement contestées, remarque Idayat Hassan, la directrice du Centre pour le développement et la démocratie (CDD) à Abuja. Bien que l’APC conserve une majorité des sièges au Sénat et à l’Assemblée nationale, « il n’y a jamais eu une telle diversité de partis politiques au sein du Parlement », s’enthousiasme-t-elle. Plusieurs gouverneurs en fin de mandat qui cherchaient à entrer au Sénat pour y terminer leur carrière ont vu leur projet déjoué par les électeurs. « La politique locale est beaucoup plus nuancée que la politique nationale. Les citoyens n’ont pas hésité à exprimer leur colère contre certaines personnalités », constate Mme Hassan.

Défi logistique
Cependant, l’opposition – qui conteste les résultats de la présidentielle – dénonce les défaillances de la Commission électorale indépendante (INEC). Celle-ci avait pourtant promis que les nouvelles machines électroniques (BVAS) déployées dans plus de 176 000 bureaux de vote garantiraient la transparence du scrutin. Finalement, l’identification faciale et digitale des électeurs a parfois connu des ratés. « En fermant son site Internet au moment crucial, puis en tardant à afficher les résultats, l’INEC n’a pas respecté ses propres règles et s’est mise hors la loi », affirme même l’avocat et activiste Abdul Aminu Mahmud.

En guise de justification, l’Agence de cybersécurité du gouvernement fédéral a annoncé le 7 mars avoir « bloqué plus de 200 attaques informatiques le jour des élections. Le lendemain, celles-ci ont augmenté de manière exponentielle jusqu’à 1,2 million et nous les avons toutes bloquées ». Mais ces manquements n’ont fait que renforcer les suspicions des Nigérians, qui étaient déjà 78 % à ne « pas faire confiance » à l’INEC avant les élections générales.

Vous pouvez partager un article en cliquant sur les icônes de partage en haut à droite de celui-ci.
La reproduction totale ou partielle d’un article, sans l’autorisation écrite et préalable du Monde, est strictement interdite.
Pour plus d’informations, consultez nos conditions générales de vente.
Pour toute demande d’autorisation, contactez sy*********@le*****.fr.
En tant qu’abonné, vous pouvez offrir jusqu’à cinq articles par mois à l’un de vos proches grâce à la fonctionnalité « Offrir un article ».

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/03/18/le-nigeria-elit-ses-gouverneurs-puissants-parrains-d-un-pays-en-crise_6166043_3212.html

Face aux défis logistiques, la Commission électorale a décidé de repousser les élections des gouverneurs d’une semaine – alors que celles-ci devaient normalement avoir lieu le 11 mars. Un délai nécessaire pour télécharger les données contenues dans les BVAS et les reconfigurer avant le prochain vote. « Le problème, c’est que cela montre encore une fois le manque de préparation criant de l’INEC », dit en soupirant l’avocat Aminu Abdul Mahmud. Au contraire, Idayat Hassan espère que ce délai permettra peut-être d’« organiser des élections crédibles et de rétablir la confiance des électeurs ». Les élections générales du 25 février ont été marquées par l’apathie des électeurs, puisque seuls 27 % des inscrits se sont rendus aux urnes – soit 25 millions de personnes sur les plus de 215 millions d’habitants que compte le Nigeria.

SourceLe Monde
- Advertisement -spot_img

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

- Advertisement -spot_img
Latest News

Océans: Etat Des Lieux Autour Du Continent Africain

La pollution plastique dans les eaux africaines n’a jamais été aussi élevée. Chaque année, des millions de tonnes de...
- Advertisement -spot_img