Le Prochain Pape Sera-t-il Africain ?

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Si la croissance de l’Église catholique était le seul indicateur de l’origine du prochain pape, il est presque certain que celui-ci serait africain.

C’est en Afrique que la population catholique croît le plus rapidement au monde, représentant plus de la moitié de l’augmentation globale. Les chiffres les plus récents du Vatican montrent qu’en 2022, près de 20 % des catholiques du monde vivaient sur le continent. Cela représente une croissance de 0,32 % par rapport à l’année précédente, la plus forte de toutes les régions.

En r

evanche, l’Europe a connu une baisse de 0,08 % au cours de la même période. Et entre 1910 et 2010, elle a vu le nombre de catholiques chuter de plus de 63 %, selon le Pew Research Centre, basé aux États-Unis. La région, autrefois considérée comme le cœur du christianisme, est devenue l’une des plus laïques au monde.

Et si l’Église catholique reste influente en Amérique latine, elle perd du terrain au profit du christianisme évangélique dans de nombreux pays. Une étude réalisée en 2022 par Latinobarómetro dans 18 pays de la région a révélé que le nombre de personnes s’identifiant comme catholiques est passé de 70 % en 2010 à 57 % en 2020.

Lorsque les cardinaux qui voteront pour le prochain pape – les cardinaux-électeurs – se réuniront au Vatican pour choisir le successeur du pape François, l’origine du candidat devrait-elle être prise en compte dans leur décision ?

Le père Stan Chu Ilo, prêtre catholique nigérian et professeur associé à l’université DePaul, le pense.

« Je pense que ce serait formidable d’avoir un pape africain », me dit-il, estimant que la direction de l’Église devrait mieux refléter la composition de la congrégation mondiale.

Le pape François a fait passer la proportion de cardinaux originaires d’Afrique subsaharienne qui voteront pour son successeur de 9 % lors de son élection en 2013 à 12 % en 2022. Mais le père Chu Ilo affirme que cela ne signifie pas nécessairement qu’ils voteront pour un Africain.

Selon lui, les cardinaux choisiront probablement quelqu’un qui a déjà une grande notoriété : « quelqu’un qui est déjà une voix influente ».

« Le problème, c’est qu’aucun membre du clergé africain n’occupe aujourd’hui de poste important au Vatican, ce qui pose problème », admet-il.

« Si l’on pense aux cardinaux africains qui sont des papes potentiels, qui occupe une place importante dans le catholicisme mondial aujourd’hui ? Il n’y en a aucun », rencherit-il.

Selon le père Chu Ilu, cette situation contraste avec celle de 2013, lorsque le cardinal ghanéen Peter Turkson était un candidat sérieux pour le poste, et celle de 2005, lorsque le cardinal nigérian Francis Arinze était un candidat potentiel lors du conclave qui a conduit à l’élection du pape Benoît XVI.

« La façon dont le continent africain et l’Église catholique en sont arrivés là surprend encore beaucoup d’entre nous, compte tenu de l’ouverture du pape François à l’égard de l’Afrique », déclare le père Chu Ilu.

« Connotation symbolique »

S’il y a eu au moins trois papes originaires d’Afrique, le dernier – le pape Gélase Ier – est mort il y a plus de 1 500 ans. Il est grand temps, selon beaucoup, d’en avoir un autre.

Mais certains catholiques africains pensent que l’on accorde trop d’importance à l’origine du prochain pape. C’est le cas du père Paulinus Ikechukwu Odozor, professeur à l’université Notre-Dame et prêtre catholique né au Nigeria.

« Je n’ai jamais pensé que parce que vous venez d’Afrique ou d’Europe, vous êtes un candidat de choix », me dit-il.

« Peu importe d’où vous venez, dès que vous êtes élu, les problèmes de tout le monde deviennent les vôtres. Vous n’avez qu’une seule préoccupation : construire le corps du Christ, où que soient les gens, quel que soit leur nombre, quel que soit le contexte dans lequel ils se trouvent.

La chose la plus importante, selon lui, est que le pape « doit être le principal théologien de l’Église ».

Il pense que « le pape doit être quelqu’un qui connaît très bien la tradition » et qui est capable de l’utiliser pour orienter les gens.

Le père Odozor déclare qu’il trouve frustrant qu’on lui demande si le prochain pape devrait être originaire d’Afrique « à cause de la connotation de symbolisme ».

« C’est comme si les gens disaient : « D’accord, les Africains sont de plus en plus nombreux, alors pourquoi ne pas leur donner un pape ? »

Selon lui, il faut faire davantage pour s’assurer que les questions qui touchent les fidèles en Afrique sont prises au sérieux par ceux qui détiennent le pouvoir au Vatican.

Parfois, dit-il, on a l’impression « que les Africains ne comptent pas, ou que leur foi est considérée comme un peu en dessous de la norme, ou contrefaite, et qu’elle ne doit pas être prise au sérieux ».

« Lorsque les Africains ont l’impression que leurs problèmes ne sont pas abordés comme ils devraient l’être, les gens commencent à se demander si nous ne pouvons pas nous faire entendre ou voir que si nous avons notre propre homme au Vatican.

Le racisme dans l’Église ?

Comme le père Chu Ilo, il estime que malgré l’augmentation du nombre de cardinaux issus du continent africain, ceux-ci n’ont pas de pouvoir réel dans l’Église.

« Je ne dénigre pas la qualité des cardinaux nommés par le pape François », explique-t-il.

Mais se demande-t-il : « Lorsque vous les nommez, leur donnez-vous du poids ? Donnez à ces personnes que vous nommez de l’autorité, confiez-leur le travail et laissez-les le faire ».

Le père Chu Ilo et le père Odozor soulignent tous deux un problème qui pourrait entraver les efforts déployés par le pape François pour rendre la direction de l’Église plus représentative.

« Il y a toujours cette question du racisme dans l’Église dont nous ne parlons même pas », déclare le père Odozor.

« Cela pourrait miner quelqu’un, peu importe son statut de pape ou ce qu’il fait, il sera perçu simplement comme un pape africain ».

À la fin de l’année 2022, le pape François avait choisi près des deux tiers des cardinaux qui nommeront son successeur, soit un peu moins que la majorité nécessaire pour élire un nouveau pape. Cela signifie que, quel que soit le candidat choisi, il y a de fortes chances qu’il partage la volonté du pape François de tendre la main aux pauvres et aux laissés-pour-compte.

Il s’agit d’une approche que le père Chu Ilo qualifie de « pauvre d’abord » et qui consiste à être « une église à l’écoute », une église plus progressiste, une église plus humble ». C’est ce qu’il souhaite voir chez tous ceux qui dirigeront l’Église à l’avenir.

L’effet de surprise

Mais il y a un autre facteur clé qui rend difficile de prédire qui sera choisi, dit le père Chu Ilo.

« Les catholiques croient que Dieu, le Saint-Esprit, aide à choisir les dirigeants de l’Église», me dit-il.

Cela signifie qu’il pourrait y avoir une surprise, comme en 2013 lorsque le pape François a été élu. « Il n’était pas celui que tout le monde prédisait », dit le père Chu Ilo.

Je lui demande ce qui compte le plus à ses yeux : que le prochain pape partage la vision de son prédécesseur pour l’Église, ou qu’il soit originaire d’Afrique ?

« Je répondrai comme un bon prêtre », me dit-il en riant.

« Je prierais pour que Dieu nous donne un pape qui poursuive la vision de François, et je prierais pour que cette personne vienne d’Afrique.

SourceBBC
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