Les cartes blanches données aux musiciens servent trop souvent de prétexte à inviter les copains. Il n’en va pas ainsi pour celle que le Musée du quai Branly-Jacques Chirac, à Paris, a donnée à Blick Bassy dans le cadre de l’exposition Sur la route des chefferies du Cameroun – Du visible à l’invisible, présentée jusqu’au 17 juillet. Salué en 2019 pour la terrible beauté de son album 1958, un tombeau en mémoire de son compatriote Ruben Um Nyobé, militant indépendantiste tué par l’armée française, le musicien et producteur camerounais a pris l’invitation à cœur au point d’imaginer sept propositions artistiques qui mêlent concerts, danse, conte et film.
« C’était l’occasion pour moi de concrétiser les différentes idées qui me passent par la tête, explique Blick Bassy, fraîchement arrivé à Paris en provenance de son village de Mintaba, en pays bassa (sud-ouest du Cameroun). J’ai de plus en plus l’intention de m’investir dans le cinéma pour participer à la création d’un récit national et à la prise de conscience de la richesse de notre écosystème. » Et de déplorer que son pays ait conservé « le nom que les Portugais lui ont donné, le pays des crevettes » quand l’hymne national « n’est une copie de La Marseillaise ». Il sait que la tâche est immense puisque « le Cameroun est une Afrique en miniature avec 270 différentes langues et qu’il n’existe pas de langue nationale comme peut l’être le bambara au Mali ».