Femme, Touareg, et réalisatrice. A 24 ans, Fati Walet Mohamed Issa vient de boucler un court-métrage documentaire de dix minutes sur la situation des filles dans la culture touareg : Tamadjrezt (Regret, en langue tamasheq).
Issue du milieu nomade de la région de Tombouctou, au Mali, où l’éducation passe souvent au second plan, la jeune femme a dû cesser ses études plusieurs années à cause des conflits qui touchent cette région depuis dix ans. « Chez nous, la femme, souvent, soit on la sort de l’école pour la marier, soit on refuse qu’elle aille faire des études », déplore-t-elle.
Saisissant « l’occasion » de porter son histoire à l’écran, Fati a postulé à un projet d’une ONG américaine. « On veut donner la parole aux femmes. (…) Elles ne sont pas assez écoutées ni impliquées » dans la société, explique Zeina Mohamed Ali, chargée du projet chez Accountability Lab.
Prostitution sur des sites d’orpaillage artisanal, violences conjugales, éducation : non-dits et tabous de la très conservatrice société malienne sont abordés à travers dix films, projetés dans une salle de conférence de Tombouctou, faute de cinéma, par la mission de l’ONU au Mali (Minusma).
Dans Tamadjrezt qu’elle a tourné seule dans un campement touareg de la région de Tombouctou – « car les équipes techniques avaient peur de venir » –, Fati Walet met en scène la petite Fatma, 15 ans, qui explique à l’écran avoir voulu poursuivre l’école. Mais son père, Med Elmedhi Ag, a refusé. « Pour nous, les femmes et les filles doivent prendre soin de leur foyer », dit-il dans le film.
Le poids des coutumes fait que « de nombreuses jeunes filles quittent l’école dès le primaire », embraye la voix off de la réalisatrice.