Un panel d’une douzaine d’écrivains et de chercheurs d’Afrique et d’ailleurs se sont embarqués avec Abdejlil Lahjomri en direction d’un horizon qui, contrairement à sa définition originelle, s’approche au fur et à mesure qu’on en parle : La création au sein de l’Académie du Royaume de la Chaire des Lettres africaines dont le lancement officiel est prévu pour mai prochain.
Banalement appelé ‘’atelier de réflexion’’, ce conclave de têtes pensantes avait pour mission d’échanger sur un grand projet, prospecter ses déclinaisons, en esquisser la structuration, ébaucher sa programmation et définir ses desseins. Et c’est dans la maïeutique des discussions que naturellement a surgi l’idée que pareil projet ne saurait se limiter au patrimoine littéraire, mais se devait de s’étendre à toutes les expressions de la culture africaine, l’artistique notamment.
‘’Il est beau, le jour où l’on rentre chez soi ! […] L’Afrique est Mon Continent, et Ma maison’’. C’est par ces mots émanant de ses entrailles, que le Roi Mohammed VI avait entamé son discours de Retour en 2017 à l’Union Africaine. Et c’est essentiellement de culture, d’échange et de formation que le Souverain a parlé dans son massage au sommet Union Africaine- Union Européenne de février 2022.
Cette dynamique globale centrée sur le continent, qui veut « triompher de l’afro-pessimisme » – l’expression est du Roi Mohammed VI – ne pouvait laisser indifférente l’Académie du Royaume qui s’y est, dès ses débuts, inscrite culturellement et intellectuellement à travers des cycles de conférences dédiées à l’Afrique et à son patrimoine.
La création d’une Chaire des Lettres africaines couronne ce sillon autant qu’elle l’institutionnalise. « L’Afrique doit faire confiance à l’Afrique’’ avait encore dit le Roi Mohammed VI en 2014 à Abidjan. Pour ce, on devrait y ajouter ce précepte inscrit au fronton du temple d’Apollon à Delphes et attribué plus tard à Socrate : « Connais-toi toi-même ».
Pour nous Africains, l’introspection à laquelle cet aphorisme « socratien » invite, s’accorde au pluriel et s’investit dans notre être commun. Sans entrer dans le détail des langues locales, les lettres d’Afrique et l’Afrique tout court se répartissent, pour ne pas dire se divisent, en quatre grandes sphères linguistiques qui s’ignorent mutuellement : l’anglophone, la francophone, la lusophone et l’arabophone. Moins prégnante sur le continent noir, s’y incruste l’hispanophone.
Les auteurs et créateurs de ces sphères, pour émerger et avoir droit de cité, doivent passer chacun via une Mecque qui lui est propre : Londres, Paris, Lisbonne ou Sao Paulo (Brésil). Accessoirement Madrid. Un ‘’via’’ qui souvent soumet les lettres africaines aux désidératas des ces capitales et à leurs prismes, sachant que la sphère arabophone passe par d’autres relais de reconnaissance et de légitimation.